vendredi, octobre 16, 2009

Cour des Comptes...


Un rapport sans pitié




La Chambre Régionale des Comptes a récemment déposé son rapport sur Val d’Isère. C’est un document très dense dont l’analyse fouillée ne laisse guère place à l’approximation et à l’improvisation. C’est fâcheux pour ceux dont la gestion est épinglée sans indulgence.


Nous nous en tiendrons seulement à ce qui a trait aux championnats du monde. Pour ce faire, nous citerons quelques extraits du rapport que nous retranscrirons en italiques de couleur bleue.


Puis nous nous interrogerons sur ceux qui portent la responsabilité de la situation constatée par la Chambre.


Commentant les comptes de 2006 et de 2007, la Chambre Régionale conclut :


« La situation pourrait devenir critique compte tenu des engagements pris à l’occasion de l’organisation des championnats du monde de ski, mais également de la construction et de la mise en service du centre sportif. Cet équipement va générer un déficit d’exploitation aujourd’hui non maitrisé par la collectivité »



Puis la Chambre des Comptes revient au Centre Sportif construit pour procurer à la Presse un local pendant la manifestation. Elle constate que le choix retenu par la commune de réaménager l’actuelle piscine a finalement été abandonné au profit « d’une construction ex nihilo ». Mais à son sujet, elle remarque sans indulgence que :


« La délibération du 24 avril 2003 autorisant le maire à signer la candidature de la commune n’évoque pas ce projet de réalisation ».


Ce qui confirme, s’il en était besoin, qu’en votant la candidature le 24 avril 2003 les élus n’ont pas été mis au courant de ce projet de construction (à l'époque on parlait plutôt d'un parking central souterrain aménagé provisoirement en centre de presse pendant les championnats. Cela convenait à tout le monde).


La Chambre poursuit en confirmant que :


« Le centre sera loué par le Comité d’Organisation (CLO) qui en fera le siège de l’organisation des championnats du monde.


Une convention du 12 décembre 2007 prévoit à son article 2 que les installations et prestations apportées par la commune sont facturées pour un montant prévu de 10 M€ liquidé selon l’échéancier suivant :


  • 334 448.16 € HT en décembre 2006
  • 1 003 344.48 € HT en octobre 2007
  • Et le solde de 8 662 208 € HT en juin 2009 »

Peut-on faire plus clair ? Pourtant le maire actuel voit les choses différemment. Il juge que le CLO ne nous doit que ce qu’il peut payer, et comme il ne lui reste rien, tant pis pour Val !


Ainsi, comme le CLO (dirigé par MM. Catelan, Killy et leurs successeurs) a dépensé sans compter, apparemment oublieux (ou insoucieux) de son engagement à l’égard de Val d’Isère, eh bien, tant pis ! C'est une ardoise de plus - mais de grande taille - que notre Commune devra supporter.


Un méchant esprit vient-il rappeler que la FFS est caution pour moitié des engagements non tenus par le CLO et que l’on pourrait peut-être la taxer de sa part du désastre ? Le maire de Val d'Isère écrit que l'on ne saurait imaginer Val d'Isère se permettant d'engager une action contre une autorité telle que la FFS.


La Chambre Régionale fait moins dans la dentelle quand – rappelons-le encore- elle va répétant que :


« Le Centre sera loué par le CLO et qu’il y a une convention du 12 décembre 2007 qui prévoit la facturation d’un loyer de 10 000 000 € ».



On se demande plus loin par quelle méchanceté la Chambre s’acharne encore sur notre malheureux Centre Sportif :


« Dans sa version initiale, en 2005, le coût d’objectif, rémunération du maître d’œuvre comprise, s’établissait à 14 560 000 € HT. Or, poursuit-elle, « dans un document interne du printemps 2008, la direction des finances de la commune évalue le coût total de l’ouvrage à 28 662 373 € TTC. »


Aujourd’hui, 30 000 000 € semble du reste un chiffre plus à jour. Et la Chambre Régionale de conclure le chapitre relatif aux championnats du monde 2009 dans les termes suivants :


« La chambre constate que la collectivité ne semble pas avoir maîtrisé le coût d’objectif de cette opération. Elle n’est pas assurée de l’obtention de près de 40 % de ses financements externes hors emprunts.

Malgré la longue maturation du projet, la commune n’a pas évalué les coûts de fonctionnement de l’équipement et n’a pas déterminé son mode de gestion.


La chambre relève que ces éléments sont de nature à accentuer l’incertitude financière dans laquelle la commune de Val d’Isère s’est engagée ».



Marc Bauer est évidemment innocent de la situation léguée par son prédécesseur, même s'il n'a pas eu raison - avant les élections - d'assurer que, selon lui, les finances de Val d'isère étaient en bon état de marche. Du moins a-t-il aujourd’hui l’honnêteté d’admettre que – ayant vu les choses de plus près - l’endettement de notre Commune est parvenu à un niveau qu'il qualifie lui-même de "record". Il déclare publiquement que cette situation est suffisamment grave pour nous priver des moyens de réaliser des investissements significatifs au cours des prochaines années (ce qui est dramatique) et qu’elle exige rigueur et fermeté dans le contrôle du fonctionnement (ce qui, tout compte fait, est sain).


Faisons ici une pause pour rappeler que, de longue date, certains prédisaient et écrivaient que Monsieur Catelan conduisait Val à la catastrophe et qu’il laisserait derrière lui « un surendettement intolérable ».


Disons aussi que les mêmes affirmaient et écrivaient que le Centre Sportif était dépourvu d’intérêt touristique, que son coût excèderait considérablement le budget fantaisiste affiché par la municipalité, et que son fonctionnement promettait d’être gravement déficitaire.


Rappelons enfin que l’opposition municipale ne se lassait pas de dire et d’écrire qu’il ne suffisait pas d’obtenir les championnats du monde pour décrocher le jackpot. Elle affirmait qu’une Commune responsable ne se lance pas dans pareille affaire pour recueillir du prestige, des honneurs ou des places. Elle ne s’engage que si elle est convaincue des avantages et du profit qu’elle en retirera.


Or dès le premier jour, l’opposition municipale s’est efforcée de convaincre la municipalité que des investissements hors de prix et d'intérêt médiocre pour l'avenir et une organisation incontrôlée pouvaient tout aussi bien nous ruiner. Mais ces propos étaient jugés iconoclastes, « quand on aime on ne compte pas » avait même lâché en séance un conseiller qui espérait sans doute nous faire taire…


Qui doit supporter la responsabilité de tout cela? Nous proposons deux personnes.


La moindre des deux est l’ancien maire qui, pendant treize ans, n’aura été efficace qu’à se faufiler à une place puis nouer les alliances nécessaires pour la conserver. Il faut le citer en premier lieu, lui qui a porté la triple responsabilité politique, technique, juridique.


À sa décharge, on peut dire deux choses. La première est que ce n’est pas la girouette qui tourne, c’est le vent. La seconde est que, s’il a mal fait, et Dieu sait qu’il ne s’en est pas privé, il se trouvait en première ligne, à un poste où l’on prend les coups. Et il en a pris beaucoup, y compris ceux de son propre camp. Celui que nous lui assénons ici étant – nous l'espérons pour lui – le dernier.



Monsieur Killy, lui, n’avait de responsabilité ni politique, ni juridique. Quand cela allait, il se hissait. Quand cela n’allait pas, il s’éloignait. Mais que reprocher à un homme si habile à bien manœuvrer ?


Eh bien ! Nous retenons contre lui la responsabilité globale de cette aventure, parce qu’il en a été l’inspirateur, la volonté et le guide.


Sans doute peut-il arguer que les décisions ou les choix procédaient légalement du maire et de sa majorité. C’est eux, ce n’est pas moi ! Cette défausse est juste.


C’est lui pourtant qui a porté la responsabilité psychologique et morale. Car l’enfant du pays enluminé de réussite, fréquemment recueilli aux pieds de l’arolle millénaire, le champion à demi séculaire qui tombe du ciel en hélicoptère, celui-là tenait à ses pieds les édiles locaux, Catelan en tête. Le maire et ses proches prenaient leurs ordres auprès de lui, éblouis par le prestige et la réputation de Celui qui côtoie les grands, à qui l’on devait tant, qui les dépassait.


C’est pourquoi nous disons que dans la prodigalité et l’inconscience dont Val d’Isère a fait preuve, Monsieur J.C. Killy a, de fait, une part de responsabilité plus grande que quiconque parce que – fort de son autorité et de son charisme - il a poussé à faire, ou bien a laissé faire des choses que la conscience aurait du lui commander d’empêcher. Mais il était trop concentré sur le succès de son entreprise, fut-ce au préjudice – et ce l’a été - des intérêts de son village.





Serge Paquin